Numéro du lot : 22
Estimation : 6000/8000 €
Guillaume APOLLINAIRE
Manuscrit autographe signé – Le Salon d’automne par Guillaume Apollinaire.
Trois pages in-8°, numérotées en tête, avec ratures et corrections.
Les deux premiers feuillets sont brunis.
[Octobre 1910].
« Ce grand artiste se nomme Pablo Picasso. »
Extraordinaire manuscrit, en premier jet, de cette critique artistique du Salon d’automne de 1910 qui se tint au Grand Palais du 1er octobre au 8 novembre 1910.
Apollinaire y défend bec et ongles Matisse, Derain, Bonnard et Picasso.
Selon L.C. Breunig, c’est au sein de ce texte qu’apparaît la première occurrence du mot « cubisme » sous la plume d’Apollinaire.
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Apollinaire décrit liminairement un beau portrait du poète Touny-Lérys réalisé par le peintre, Madame Van Bever de la Quintinie, puis s’enthousiasme pour les travaux de Matisse : Henri Matisse, qui déconcerte tant de regards mal éduqués, est un peintre extrêmement séduisant. La couleur très rare et très belle, voilà ce qu’il trouve plus souvent qu’aucun autre peintre, et la puissance décorative de ses ouvrages ne peut être niée à moins d’une insigne mauvaise foi. Les deux panneaux qu’il exposait cette année sont ce que, pour ma part, je préfère dans l’œuvre de cet artiste, que je suis le seul — et je ne dis pas cela sans quelque coquetterie — à avoir toujours défendu.
Il évoque avec admiration les peintures décoratives de Maurice Denis et salue leur musicalité ravissante : L’œuvre la plus considérable de ce Salon, ce sont les peintures décoratives inspirées à M. Maurice Denis par le Décaméron. Maurice Denis est un grand artiste servi par une forte culture.
Il cite Derain, Marie Laurencin, Puy, etc., et s’arrête sur le talent incomparable de son ami Pablo Picasso singé par quelques artistes lors de ce salon : L’on a un peu parlé d’une manifestation bizarre de cubisme. Les journalistes mal avertis ont fini par y voir de la métaphysique plastique. Mais ce n’est même pas cela, c’est une plate imitation sans vigueur d’ouvrages non exposés et peints par un artiste doué d’une forte personnalité et qui en outre n’a livré ses secrets à personne. Ce grand artiste se nomme Pablo Picasso. Mais le cubisme au Salon d’automne c’était le geai paré des plumes du paon.
Apollinaire clôt son texte sur la section du mobilier. Très critique envers les arts décoratifs allemands (auxquels 18 salles sont consacrées), il est séduit par un boudoir décoré par Pierre Bonnard qui : prouve bien que l’art décoratif peut encore donner en France des productions excellentes.
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Nous joignons les feuillets de la revue Poésie retranscrivant la version imprimée de ce texte.
Nous joignons également une carte autographe signée de Marcel Marchandeau, dit Touny-Lérys, adressée en mars 1964 à Michel Décaudin et relative au texte d’Apollinaire.
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Provenance :
. Collection M.D.
Bibliographie :
. G. Apollinaire. Œuvres en prose. Pléiade Tome II, pp. 228.229.
. Poésie – « Le Salon d’Automne », p. 74-75.
